TEXTILE POUR LA CIRCONCISION
Brit-Milah
Numéro d'objet: |
22530 |
Catégorie: |
Objet cycle de la vie |
Technique: |
Tissu brodé fil d'or |
Origine: |
Tétouan |
Date: |
XIXe |
Support: |
Textile |
Recherche dans "Notes":
Les broderies du fil d'or du Maroc sont à juste titre célèbres. Elles sont toujours réalisées de nos jours par des artisans citadins, continuateurs habiles d'une pratique séculaire. Dans les objets traditionnels, la broderie au fll d'or comporte l'application de fils plus ou moins épais, mais aussi de cordonnets, tresses ou ganses pour couvrir parfois de larges surfaces dans certains vêtements d'apparat. On trouve des décors au fil d'or sur des babouches, des ceintures, de riches caftans, le tarbouche et le petit burnous de fête des jeunes garçons, ainsi que sur des tenues de mariage et des accessoires religieux juifs. Le fil d'or concourt au décor des coussins en velours, et des tissus d'ameublement. Les panneaux assemblés pour constituer les hayti, tentures murales de feutre, de satin ou de velours, comportaient chacun le dessin d'un arc entourant souvent un motif brodé au fil de soie ou d'or. Ce dernier était employé par ailleurs dans la décoration des pièces de harnachement, dans la passementerie et le tissage des brocarts. Le fil d'argent, moins onéreux, avait les mêmes usages.Une ceinture brodée traditionnelle à Fès est un bon exemple de la complexité de certaines réalisation anciennes .Les grands motifs sur étoffe s'exécutent maintenant encore en recouvrant entièrement de fil d'or ou d'argent un modèle de papier prédécoupé, ajouré ou seulement fendu aux lignes de passage de l'aiguille. Ce modèle, qui est fabriqué en série, est collé sur l'endroit du tissu, lui-même collé sur une doublure de carton, de toile épaisse ou de basane fine. Le papier du modèle est jaune d'un côté, blanc de l'autre : la face supérieure du modèle sera jaune si on doit broder au fil d'or, blanche si c'est au fil d'argent, pour masquer les interstices qui pourraient se créer entre les fils d'une broderie abîmée. L'outillage comporte une alêne qui perce l'étoffe doublée, et une aiguille avec laquelle on passe par-dessus le fil métallique un solide fil de lin, ramené ensuite à l'envers, et suffisamment tiré pour être invisible à l'endroit ; le fil d'or ou d'argent est fixé sans avoir été enfilé, il ne quitte jamais l'endroit du tissu. Cela économise la quantité de fils précieux ; de plus leur revêtement ne risque pas d'être arraché au passage à travers un tissu.Certaines pièces de Tétouan du XIX° siècle montrent un autre type de travail, exécuté sans modèle de papier et bourré par endroits d'épaisseurs de fil de soie. Enfin il existait autrefois des ouvrages plus rares et fragiles, pour lesquels on employait une étroite lame d'argent doré. Cette broderie est dite lamée ; comme la précédente elle semble au Maroc avoir été une spécialité juive. Jusqu'aux années 1930, la fabrication du fil d'or était « l'une des industries les plus anciennes, les pus renommées et les plus importantes du mellah (ou quartier juif de Fès» (Vicaire et Le Tourneau) ; vers cette époque, elle occupait directement 700 personnes, soit près au dixième de la popuation de ce mellah. La dénomination du «fil d'or» se réfère à son apparence, mais ne reflète pas exactement sa constitution. C'est en se penchant sur un ancienne broderie un peu élimée qu'on découvre la compexité de sa réalisation ; il ne s'agit pas d'étirer une baguette d'or jusqu'à obtenir un fil assez fin pour passer dans le chas d'une aiguille ; cette technique n'est pas inconnue, mais son utilisa1ion est d'un prix prohibitif. Le fil d'or utilisé ordinairement est obtenu en enroulant sur un fil de soie tordu une étroite et mince lame d'argent doré. L'industrie du fil d'or, telle qu'elle se pratiquait traditionneement au début du siècle dernier, nécessitait l'intervention de plusieurs catégories d'ouvriers spécialisés. Le métal acheté par les patrons provenait de vieux bijoux destinés à la fonte, d'anciennes monnaies, parfois de lingots importés. Il était d'abord réduit à l'état de feuilles extrêmement minces par des batteurs d'or. Par ailleurs, des baguettes d'argent étaient tréfilées jusqu'à l'obtention d'un fil assez gros, qui était doré à la feuille ; pour cela on enroulait le fil d'argent dans une feuille d'or, puis on le lissait en le polissant avec une pierre dure. Le fil était alors tréfilé à nouveau jusqu'à un diamètre d'un dixième de millimètre,puis laminé, pour obtenir enfin une étroite lame dorée, qui ne comportait finalement qu'environ ,5 à 2 pour cent d'or, suivant les qualités. Pendant ce temps des femmes filaient de la soie teinte en orange, qui était destinée à être l'âme du fil d'or ; sa couleur rendait moins visible l'usure éventuelle du revêtement métallique. La dernière opération revenait aux ouvriers qui enroulaient la lame d'argent doré autour de la soie filée, et qui étaient les vrais fabricants du fil d'or. Ils devaient mettre tout leur soin à assurer un enroulement parfaitement régulier, qui donnait l'illusion d'un fil métallique continu. Une partie en était écoulée d'autres villes comme Debdou, Meknès, Rabat et Salé, Tétouan, Marrakech.. La broderie au fil d'or est encore très vivante, mais l'origine de la tradition reste obscure. Le nom donné au fil d'or, le sqalli, semble n'avoir pas éveillé la curiosité pourtant ce mot, qui signifIe en arabe le sicilien ,est pour le moins surprenant au premier abord. Quels rapports les artisans de la communauté juive fassie ont-ils entretenus avec la Sicile ?
Il est vrai qu'il faut remonter loin dans l'histoire des liens des juifs de Méditerranée, non pas avec les métiers utilisant les métaux précieux, liens avérés depuis l'Antiquité au Proche-Orient, mais avec le travail de la soie. Dans les premiers siècles de l'ère chrétienne, on trouvait des « soyeux» dans la population juive de plusieurs pays de l'Est méditerranéen, notamment en Grèce continentale et à Corfou. Roger Il, roi normand de Sicile au XII° siècle, est un souverain belliqueux, mais bon administrateur et tolérant ; sous son règne la Sicile atteindra un haut degré de prospérité, jusqu'à rivaliser avec Venise. Au retour d'une expédtion contre les Byzantins, il ramène des spécialistes juifs du travail de la soie capturés à Thèbes, célèbre au Moyen-Âge pour ses manufactures de soieries, et dans d'autres cités de Grèce, pour les instaler dans son usine royale de Palerme. On ne sait pas si les juifs y traitaient à la fois l'or et la soie, mas on peut le supposer ; il semble que le nom de shekel, d'origine fort ancienne, donné à la monnaie israélienne actuelle, ait la même racine que le mot sqalli (sicilien). L'histoire de la Sicile est mouvementée. Au XV° siècle elle appartient au royaume d'Aragon. Ferdinand II d'Aragon promulguera en 1492 l'Édit d'Expulsion qui fera fuir au Maroc un grand nombre de juifs. Le «sqali » peut tirer son origine d'un rapport direct des israélites déjà implantés au Maroc depuis des siècles avec leurs coreligionnaires de Sicile, ou d'un passage de cette
technique par l'Espagne à une époque plus ou moins reculée. Du fil d'or aurait continué à être produit dans ce pays par des juif sans perdre son nom de« sicilien », et l'aurait conservé encore en traversant avec eux au XV° siècle le détroit de Gibraltar.
Marie-Rose Rabaté
André Goldenberg
Arts et Cultures du Maroc
Historique:
La naissance d'une fille ne donne lieu qu'à une modeste cérémonie le jour du zebed habbat où un nom lui est donné.
Au contraire, la naissance d'un fils, qui est bruyamment et chaleureusement accueillie aux sons de barukh habba (sois le bienvenu) et de siman tov (bon augure), s'accompagne de nombreuses cérémonies. Chaque soir, depuis le jour de la naissance jusqu'à celui de la circoncision, parents et amis sont conviés à un tehdid. On y chante, mange et boit, on y raconte des histoires et des anecdotes, on joue aux charades et à des jeux de société. A minuit, les portes de la chambre se ferment; le cohen prend un glaive caché sous le matelas du bébé afin de le "protéger" des mauvais esprits, le pose sur l'enfant et prononce à trois reprises la bénédiction des cohanim: "Que l'Eternel te bénisse et te protège!".
Le troisieme jour, seules les femmes sont invitées à une fête, Et-tkhames. La sage-femme décore les murs de la chambre avec des dessins en forme de main, khemsa, contre le mauvais oeil. A la fin de la fête, chaque convive fait un don en argent, ghrama, à la sage-femme, qebla, et à son assistante, er-rafda.
La veille de la circoncision, lilt Eliyahu hannabi, nuit du prophète Elie, dans la chambre décorée de tapis et de foulards de soie multicolores, on dispose l'asianto, table recouverte d'un tapis sur lequel sont posés un couvre-Thora, deux chandeliers garnis de grandes bougies et des parfums pour la récitation du qidduch. Le père se fait couper les cheveux près du fauteuil du prophète Elie et ses amis donnent un ghrama au coiffeur.
Le jour de la circoncision, le père revient de la synagogue, accompagné de tous les fidèles, enveloppé de son talit (en semaine, il porte aussi ses tefillin). Les membres de la confrérie du prophete Elie, hevrat Eliyahu, ouvrent la cérémonie par des chants propres à cette occasion. Le parrainage est vendu aux enchères au profit de la confrérie, ou est racheté par le père qui offre ainsi a l'un de ses parents l'honneur de s'asseoir sur le fauteuil du prophète Elie.
Avant de procéder à la circoncision, on fait descendre l'accouchée de son lit. Revêtue de sa keswa l-kbira elle se rend jusqu'à la mezuza fixée au montant de la porte d'entrée, la baise et retourne à sa place.
I.a cérémonie se termine par un grand festin ouvert à tous, le repas du prophète Elie, se'udat-Eliyahu.
Hanania Dahan
Bibliographie:
Arts et Cultures du Maroc p.54