COUVRE-MATSOT DE PESSAH

Pessah

Numéro d'objet: 21632
Catégorie: Objet cycle de l'année
Technique: Tissu brodé
Origine: Maroc Espagnol
Date: 1920
Support: Textile

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Les broderies du fil d'or du Maroc sont à juste titre célèbres. Elles sont toujours réalisées de nos jours par des artisans citadins, continuateurs habiles d'une pratique séculaire. Dans les objets traditionnels, la broderie au fll d'or comporte l'application de fils plus ou moins épais, mais aussi de cordonnets, tresses ou ganses pour couvrir parfois de larges surfaces dans certains vêtements d'apparat. On trouve des décors au fil d'or sur des babouches, des ceintures, de riches caftans, le tarbouche et le petit burnous de fête des jeunes garçons, ainsi que sur des tenues de mariage et des accessoires religieux juifs. Le fil d'or concourt au décor des coussins en velours, et des tissus d'ameublement. Les panneaux assemblés pour constituer les hayti, tentures murales de feutre, de satin ou de velours, comportaient chacun le dessin d'un arc entourant souvent un motif brodé au fil de soie ou d'or. Ce dernier était employé par ailleurs dans la décoration des pièces de harnachement, dans la passementerie et le tissage des brocarts. Le fil d'argent, moins onéreux, avait les mêmes usages.Une ceinture brodée traditionnelle à Fès est un bon exemple de la complexité de certaines réalisation anciennes .Les grands motifs sur étoffe s’exécutent maintenant encore en recouvrant entièrement de fil d’or ou d’argent un modèle de papier prédécoupé, ajouré ou seulement fendu aux lignes de passage de l’aiguille. Ce modèle, qui est fabriqué en série, est collé sur l’endroit du tissu, lui-même collé sur une doublure de carton, de toile épaisse ou de basane fine. Le papier du modèle est jaune d’un côté, blanc de l’autre : la face supérieure du modèle sera jaune si on doit broder au fil d’or, blanche si c’est au fil d’argent, pour masquer les interstices qui pourraient se créer entre les fils d’une broderie abîmée. L’outillage comporte une alêne qui perce l’étoffe doublée, et une aiguille avec laquelle on passe par-dessus le fil métallique un solide fil de lin, ramené ensuite à l’envers, et suffisamment tiré pour être invisible à l’endroit ; le fil d’or ou d’argent est fixé sans avoir été enfilé, il ne quitte jamais l’endroit du tissu. Cela économise la quantité de fils précieux ; de plus leur revêtement ne risque pas d’être arraché au passage à travers un tissu.Certaines pièces de Tétouan du XIX° siècle montrent un autre type de travail, exécuté sans modèle de papier et bourré par endroits d’épaisseurs de fil de soie. Enfin il existait autrefois des ouvrages plus rares et fragiles, pour lesquels on employait une étroite lame d’argent doré. Cette broderie est dite lamée ; comme la précédente elle semble au Maroc avoir été une spécialité juive. Jusqu’aux années 1930, la fabrication du fil d’or était « l’une des industries les plus anciennes, les pus renommées et les plus importantes du mellah (ou quartier juif de Fès» (Vicaire et Le Tourneau) ; vers cette époque, elle occupait directement 700 personnes, soit près au dixième de la popuation de ce mellah. La dénomination du «fil d’or» se réfère à son apparence, mais ne reflète pas exactement sa constitution. C’est en se penchant sur un ancienne broderie un peu élimée qu’on découvre la compexité de sa réalisation ; il ne s’agit pas d’étirer une baguette d’or jusqu’à obtenir un fil assez fin pour passer dans le chas d’une aiguille ; cette technique n’est pas inconnue, mais son utilisa1ion est d’un prix prohibitif. Le fil d’or utilisé ordinairement est obtenu en enroulant sur un fil de soie tordu une étroite et mince lame d’argent doré. L’industrie du fil d’or, telle qu’elle se pratiquait traditionneement au début du siècle dernier, nécessitait l’intervention de plusieurs catégories d’ouvriers spécialisés. Le métal acheté par les patrons provenait de vieux bijoux destinés à la fonte, d’anciennes monnaies, parfois de lingots importés. Il était d’abord réduit à l’état de feuilles extrêmement minces par des batteurs d’or. Par ailleurs, des baguettes d’argent étaient tréfilées jusqu’à l’obtention d’un fil assez gros, qui était doré à la feuille ; pour cela on enroulait le fil d’argent dans une feuille d’or, puis on le lissait en le polissant avec une pierre dure. Le fil était alors tréfilé à nouveau jusqu’à un diamètre d’un dixième de millimètre,puis laminé, pour obtenir enfin une étroite lame dorée, qui ne comportait finalement qu’environ ,5 à 2 pour cent d’or, suivant les qualités. Pendant ce temps des femmes filaient de la soie teinte en orange, qui était destinée à être l’âme du fil d’or ; sa couleur rendait moins visible l’usure éventuelle du revêtement métallique. La dernière opération revenait aux ouvriers qui enroulaient la lame d’argent doré autour de la soie filée, et qui étaient les vrais fabricants du fil d’or. Ils devaient mettre tout leur soin à assurer un enroulement parfaitement régulier, qui donnait l’illusion d’un fil métallique continu. Une partie en était écoulée d’autres villes comme Debdou, Meknès, Rabat et Salé, Tétouan, Marrakech.. La broderie au fil d’or est encore très vivante, mais l’origine de la tradition reste obscure. Le nom donné au fil d’or, le sqalli, semble n’avoir pas éveillé la curiosité pourtant ce mot, qui signifIe en arabe le sicilien ,est pour le moins surprenant au premier abord. Quels rapports les artisans de la communauté juive fassie ont-ils entretenus avec la Sicile ?
Il est vrai qu’il faut remonter loin dans l’histoire des liens des juifs de Méditerranée, non pas avec les métiers utilisant les métaux précieux, liens avérés depuis l’Antiquité au Proche-Orient, mais avec le travail de la soie. Dans les premiers siècles de l’ère chrétienne, on trouvait des « soyeux» dans la population juive de plusieurs pays de l’Est méditerranéen, notamment en Grèce continentale et à Corfou. Roger Il, roi normand de Sicile au XII° siècle, est un souverain belliqueux, mais bon administrateur et tolérant ; sous son règne la Sicile atteindra un haut degré de prospérité, jusqu’à rivaliser avec Venise. Au retour d’une expédtion contre les Byzantins, il ramène des spécialistes juifs du travail de la soie capturés à Thèbes, célèbre au Moyen-Âge pour ses manufactures de soieries, et dans d’autres cités de Grèce, pour les instaler dans son usine royale de Palerme. On ne sait pas si les juifs y traitaient à la fois l’or et la soie, mas on peut le supposer ; il semble que le nom de shekel, d’origine fort ancienne, donné à la monnaie israélienne actuelle, ait la même racine que le mot sqalli (sicilien). L’histoire de la Sicile est mouvementée. Au XV° siècle elle appartient au royaume d’Aragon. Ferdinand II d’Aragon promulguera en 1492 l’Édit d’Expulsion qui fera fuir au Maroc un grand nombre de juifs. Le «sqali » peut tirer son origine d’un rapport direct des israélites déjà implantés au Maroc depuis des siècles avec leurs coreligionnaires de Sicile, ou d’un passage de cette
technique par l’Espagne à une époque plus ou moins reculée. Du fil d’or aurait continué à être produit dans ce pays par des juif sans perdre son nom de« sicilien », et l’aurait conservé encore en traversant avec eux au XV° siècle le détroit de Gibraltar.

Marie-Rose Rabaté
André Goldenberg
Arts et Cultures du Maroc

Historique:

C'EST LE TEMPS DE NOTRE LIBÉRATION, zémane 'hérouténou.
Nous sommes libérés par Hachém, car nous n'étions pas capables de sortir de l'état d'assimilation à la splendide culture égyptienne qui tenait notre identité dans son carcan. Il y a eu la dimension de l'extermination organisée des Hébreux mais il y a eu également un autre aspect souligné par d'autres commentaires et par des enluminures au cours des âges. Comme en tous pays, cette assimilation avait de nombreux côtés bénéfiques et les juifs étaient appréciés (ainsi Moché avait accès auprès du Pharaon et ils purent sans difficulté demander à emprunter des vases précieux avant de partir dans le désert, ce qui témoigne de relations heureuses) mais il y avait également les persécutions terribles ; en 50 ans, les juifs connaissent toutes ces étapes mêmes dans les pays de la haute culture occidentale.
Que cette splendeur ait tourné finalement en cauchemar n'est pas le motif principal de la libération, c'est plutôt la suite logique de toutes les assimilations qui n'aboutissent ni à une greffe, ni à une intégration, ni à un rejet calme ; l'histoire juive est une répétition de ces paradis temporaires dans les valeurs des autres qui se terminent en cauchemar. Les Juifs y reçoivent, les Juifs apportent, les Juifs font connaître leur message et leurs dons, ils éveillent des étincelles qui se joignent à eux, mais tout cela n'est que transit. Et le temps passe et se perd.
Mistrayim, l'Egypte d'alors, était le summum de la coordination impériale des valeurs humaines de l'époque ; ce qui nous en reste et suscite encore l'émerveillement, peut nous faire comprendre la difficulté de proposer à une population intégrée de quitter pour l'inconnu, les promesses, et surtout pour... le désert... et en se basant seulement sur la foi dans le message des valeurs ancestrales et du pôle hypothétique d'Israël et de Jérusalem.
Tout cela est totalement actuel, tant sur le plan culturel, économique, que personnel. Bien des Juifs qui décident de monter en Israël ressentent mot pour mot chacun de ces versets. La Torah est historique, actuelle et perpétuelle.
Il n'est donc pas possible de diviser le monde entre mal et bien, comme si les autres étaient tout mal et nous tout bien, le problème est ailleurs : c'est celui d'une fidélité, d'un choix, d'une capacité d'être vrai chacun, aujourd'hui, face au message connu et transmis à nous par les générations, avec la tâche de le réaliser et de le passer aux générations suivantes avec notre contribution.